Propriété intellectuelle et nouvelles technologies

Dans un monde où l’innovation technologique est un moteur clé de la compétitivité, la protection de la propriété intellectuelle (PI) est cruciale pour les entreprises évoluant dans le secteur des nouvelles technologies.

1 – Droits d’auteur : protéger les créations originales

Le droit d’auteur protège les œuvres originales dès leur création, sans qu’un dépôt soit nécessaire. Dans le domaine des technologies, cela inclut les logiciels, les bases de données, les designs d’interface, et autres créations numériques. En France, le droit d’auteur est régi par le Code de la propriété intellectuelle (articles L.111-1 et suivants).

Le titulaire des droits d’auteur bénéficie d’un droit moral perpétuel et d’un droit patrimonial qui lui permet d’exploiter commercialement son œuvre pendant toute sa vie, et pour 70 ans après son décès.

La protection par le droit d’auteur est fondamentale en matière de logiciels, car elle constitue le principal droit de propriété intellectuelle applicable à ces créations. Le droit d’auteur protège automatiquement le code source dès sa création, sans nécessité de dépôt. Ce droit confère à l’auteur des droits exclusifs sur la reproduction, la modification, et la distribution du logiciel. Pour renforcer cette protection, les développeurs peuvent recourir à des outils comme le séquestre ou la procédure e-Soleau. Par ailleurs, pour exploiter pleinement un logiciel ou code développé par un programmeur indépendant, il est essentiel que la cession des droits d’auteur soit formalisée par écrit, conformément à l’article L.131-2 du Code de la propriété intellectuelle. Cette formalisation est cruciale pour sécuriser la titularité des droits et garantir que le titulaire puisse accorder des licences à l’avenir.

La société Ubisoft, qui commercialise des jeux vidéo, protège ses créations originales, en ce compris les codes sources et les concept arts, via le droit d’auteur. Ubisoft a ainsi attaqué Google et Apple en justice aux Etats-Unis en raison d’un clone chinois de Tom Clancy’s Rainbow Six : Siege sur l’AppStore et le Google Play Store sur la base de la protection de droit d’auteur.

2- Marques : préserver l’identité de votre entreprise

Une marque est un signe distinctif susceptible de représentation qui permet de différencier les produits ou services d’une entreprise de ceux de ses concurrents. Elle est essentielle pour établir une identité de marque et distinguer votre entreprise sur le marché.

En France, le régime des marques est régi par les articles L.711-1  à L731-4 du Code de la propriété intellectuelle, qui disposent notamment que la marque doit être distinctive, licite, non déceptive et disponible. Une marque enregistrée confère à son titulaire un droit exclusif d’exploitation pour une durée de 10 ans, renouvelable indéfiniment.

La contrefaçon de marque constitue une véritable plaie pour les entreprises de la tech : selon une étude du site marchand Priceminister, le nombre de produits high tech contrefaits a bondi de 170% en 2008 sur la toile (mobiles, baladeurs, logiciels), et sur l’ensemble des objets contrefaits repérés par le site marchand, 59% appartiennent au secteur de la mode, 37% sont des produits technologiques et 4% des biens culturels.

Dans un marché mondialisé, il est impératif de protéger sa marque au-delà des frontières nationales. Le  dépôt d’une marque européenne (MUE), ou l’utilisation du système de Madrid permettent aux entreprises de déposer une marque couvrant plusieurs pays. Toutefois, il est important de surveiller régulièrement les marchés étrangers pour détecter d’éventuelles violations de marque.

Disposer d’un portefeuille de marques structuré peut constituer un atout crucial pour protéger ses noms de domaine, développer de nouveaux produits, préparer une levée de fonds et se protéger de concurrents déloyaux.

3- Brevets : protéger les inventions technologiques ayant une application industrielle

Le brevet est un titre de propriété industrielle qui confère à son titulaire un monopole d’exploitation sur une invention pendant une durée maximale de 20 ans. Ce droit exclusif empêche tout tiers de produire, utiliser, vendre ou importer l’invention brevetée sans l’autorisation du titulaire.

Pour les entreprises de la tech, breveter une invention est un moyen de protéger une technologie innovante contre la concurrence. En France, pour qu’une invention soit brevetable, elle doit répondre à trois critères : nouveauté, activité inventive et application industrielle (article L.611-10 du Code de la propriété intellectuelle).

Ainsi, la société française Withings, connue pour ses objets connectés dans le domaine de la santé, a déposé plusieurs brevets pour ses technologies de capteurs de santé. Ces brevets lui ont permis de se protéger contre des copies de ses produits par des concurrents, tout en valorisant l’entreprise lors de son rachat par Nokia pour 170 millions d’euros en 2016.

Un logiciel ou un algorithme, pris isolément, ne peut généralement pas être protégé par un brevet, car ce titre est réservé aux inventions techniques présentant une application industrielle. En droit français et européen, pour qu’un logiciel ou un algorithme soit brevetable, il doit être intégré dans un processus technique ou avoir un effet technique supplémentaire. Concrètement, cela signifie qu’il doit interagir avec des éléments matériels ou avoir une application concrète, comme par exemple une intégration dans un objet connecté (IoT). Par exemple, un dispositif IoT qui inclut un algorithme de gestion de données spécifiquement conçu pour optimiser les performances pourrait être brevetable, car le logiciel apporte une contribution technique au fonctionnement de l’appareil. Le brevet ne sera pas accordé sur le logiciel pris isolément, mais sur l’ensemble composé du procédé (l’objet connecté) et du logiciel. En revanche, un logiciel ou un algorithme sans lien direct avec un appareil physique ou une application industrielle spécifique ne peut prétendre à une protection par brevet.

4- Dessins et modèles : protéger l’apparence d’un produit

La protection des dessins et modèles porte sur l’apparence esthétique d’un produit, qu’il s’agisse de la forme, des contours, des couleurs, de la texture ou des matériaux du produit ou de son ornementation. Dans les nouvelles technologies, cette protection est cruciale pour sécuriser l’aspect visuel de dispositifs tels que les smartphones, les tablettes, les objets connectés (IoT), ou les interfaces utilisateur. Par exemple, le design d’un produit innovant, comme la forme d’un casque de réalité virtuelle ou l’interface d’une application, peut être enregistré en tant que modèle auprès de l’INPI en France ou de l’EUIPO au niveau européen, garantissant ainsi un monopole d’exploitation jusqu’à 25 ans.

Cette protection permet de prévenir les copies non autorisées par des concurrents et de renforcer la valeur de l’entreprise sur le marché. La protection des dessins et modèles est donc un atout stratégique pour les entreprises technologiques, leur permettant de se distinguer visuellement et de protéger leur identité de marque dans un secteur où l’innovation et l’esthétique sont souvent déterminantes pour le succès commercial, comme l’illustre le cas d’Apple versus Samsung. Le contentieux entre Apple et Samsung a débuté en 2011 lorsque Apple a accusé Samsung de copier le design et les fonctionnalités de l’iPhone avec ses smartphones Galaxy. Les procédures se sont déroulées dans plusieurs juridictions à travers le monde, notamment aux États-Unis, en Europe, en Corée du Sud, en Australie, et au Japon. Cependant, les batailles les plus importantes se sont concentrées aux États-Unis. Apple a accusé Samsung de violations de ses droits sur des brevets, marques, dessins et modèles et droits d’auteur. Concernant plus spécifiquement le design de ses produits, Apple a reproché à Samsung d’avoir reproduit les coins arrondis de l’iPhone, la grille d’icônes sur l’écran d’accueil, l’apparence générale du smartphone, le packaging et les interfaces utilisateur. Après plusieurs procès et appels, Samsung a accepté de payer 539 millions de dollars à Apple, mettant fin à la plupart des litiges entre les deux sociétés.

Conclusion : L’importance de protéger ses actifs immatériels

La protection de la propriété intellectuelle est un enjeu crucial pour les entreprises du secteur des nouvelles technologies. Face à un environnement concurrentiel de plus en plus globalisé, il est indispensable d’adopter une stratégie proactive de protection de la PI, qu’il s’agisse de brevets, de marques ou de droits d’auteur.

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